Participation au temps de la Covid-19 - Relations école-famille-communauté : inégalités et iniquités - L’anormalité ou la normalité (in)tolérable en matière d'équité


Le 29 avril 2021 s’est déroulée la dernière séance de la troisième série des Panels en réseau concernant l’anormalité ou la normalité (in)tolérable en matière d’équité en lien avec la thématique générale sur les inégalités et iniquités scolaires en temps de la Covid-19. Marie-Claude Bernard (Université Laval), Nadège Bikie Bi Nguema (ÉCOBES, Cégep de Jonquière) et d’autres participant·e·s se questionnent sur le sens de ce qui est considéré normal, (in)tolérable ou, au contraire, anormal, (in)tolérable. Leur dialogue s’appuie sur 4 scénarios poreux de la normalité de Fourez (1996). Dire « c’est normal » peut renvoyer à: 

•       Faire entrer un phénomène dans le cadre de notre compréhension

•       Adopter des critères statistiques fondés sur des présupposés théoriques

•       Un consensus social; des attentes sociales; des normes socialement admises

•       Ce qui est contraire à ce qui « devrait » être; jugement de valeur; compréhension éthique et normative du « normal »; moralement acceptable

Premier scénario, en affirmant que tous les enfants vont à l’école et ne sont donc pas à la maison est normal en contexte québécois et en nombre d’autres contextes. Qu’un·e parent·e enseigne à son enfant durant les heures d’école est anormal; c’est reconnu comme le métier des enseignant·e·s. Que les élèves accusent un retard d’apprentissage est normal, car la pandémie a bouleversé le calendrier scolaire habituel. Mais encore? Ce prétendu retard existe par rapport à quoi (le curriculum, les exigences de passage à un niveau supérieur de scolarisation)? Ce retard existe-t-il vraiment quand on pose la question « par rapport à qui », aux cohortes prépandémies? aux cohortes actuelles des autres classes? des autres écoles? des autres régions? des autres pays? En mars 2021, l’UNESCO identifiait une vingtaine[1] de pays n’ayant pas du tout repris l’école. N’est-on donc pas « en retard » collectivement ou « en pause »? Quand le retard dans les apprentissages est perçu par les parents est-il tolérable pour eux? Voici d’ailleurs ce à quoi des parents associaient l’école à la maison de leurs enfants (cliquer ici). Chose certaine, la gestion des séances de classe à distance à la maison s’est ajoutée au rôle parental, ce qui a compliqué leur conciliation travail-famille-loisir et créé des inégalités scolaires chez les élèves. Étant donné le profond bouleversement global des rôles de chacun (p.ex. perte d’emploi, ajout de responsabilités, nouvelles attentes sociales), la pandémie serait anormale. 

Deuxième scénario, l’anormalité vue statistiquement serait quelque chose qui n’entre pas dans les normes, serait une sorte d’aberration mathématique. Pour sa part, une normalité statistique est-elle suffisante pour qualifier quelque chose de tolérable? Par exemple, la faible présence de femmes en science est statistiquement normale, mais est-elle pour autant tolérable? Autre exemple, il y a une augmentation des diagnostics liés aux différents troubles d’apprentissage et de comportements chez les élèves dans les écoles. Cette augmentation des troubles se fait sous quel regard? Médical? Sociologique? Pédagogique? De même, si l’on accepte collectivement l’idée d’un retard des apprentissages chez les élèves par rapport au curriculum, est-ce qu’il y aurait un bond fulgurant des élèves en difficulté? Les conséquences d’un tel bond seraient-elles intolérables et selon qui? Certes, les statistiques éclairent celui qui veut bien regarder un phénomène précis et qui endosse les critères qui fixent la situation, mais risque de réduire la mouvance et la complexité du phénomène observé. Le cadre statistique a donc ses limites et on se doit de questionner les perspectives théoriques qui le sous-tendent. De même, les données sur quoi s’appuient des jugements statistiques peuvent être « contaminées » par des acteurs qui manipulent celles-ci pour leur profit (p.ex. je dois avoir des élèves avec des besoins particuliers sans quoi j’obtiendrai moins de ressources financières pour soutenir l’enseignement). De surcroit, des données statistiques pourraient être utilisées pour servir une politique partisane.

Troisième scénario, c'est le consensus social qui émerge autour d'un phénomène pourtant contraire à l’attente commune selon des normes socialement admises. Par exemple, imposer le port du masque à tout le monde dans l’école alors que des personnes ne le supportent pas, est-ce tolérable, intolérable? Pratiquer l’enseignement à distance pour répondre aux exigences sanitaires, est-ce tolérable, intolérable? Exiger l’autorégulation des enfants à la maison pour leurs apprentissages, est-ce tolérable, intolérable? En exigeant cette dernière, on confie une lourde responsabilité à l’enfant et à son entourage d’autant plus si le milieu est fragilisé. La diversité des situations complique le jugement, mais, dans une logique de prise de décision, le statu quo est normalement intolérable. 

Le quatrième scénario repose sur un jugement de valeurs. L’anormal est ce qui est contraire à ce qui « doit » être. Les attentes sociales ont peut-être changé, mais les inégalités persistent. Est-ce tolérable de voir l’environnement de travail à la maison d’un enseignant·e, d’un l’élève, d’un pair? Est-ce tolérable d’échouer à une évaluation certificative (p.ex. examen ministériel, examen de conduite) vu les différentes conditions d’apprentissage ayant prévalu au cours des mois antérieurs? Est-ce tolérable de ne pas faire une évaluation certificative en raison de la pandémie? Est-ce tolérable de décrocher pour des raisons de santé mentale ou de distraction à l’écran? 

À l’évidence, la pandémie a chamboulé une multitude de contextes – des situations les plus personnelles aux structures organisationnelles les plus globales – notamment en fragilisant l’imperméabilité des milieux d’activité et des rôles de chacun. Est-ce que vivre en suspension en attendant un retour comme avant serait normal, tolérable? Est-ce que la métaphore de la crise et de ses vagues assure une continuité dans notre compréhension du monde et notre appartenance à celui-ci? Peut-être que les ruptures, les zones aveugles et les incohérences qui marquent notre quotidien sont normales, tolérables sur un plan individuel. Sur un plan collectif, la gouvernance résiste à l’incertitude (ou plutôt au chaos qui guette celle-ci) alors que l’inconnu nous frappe de plein fouet. De nouvelles situations effritent également la légitimité de certaines règles. Alors, penser ensemble et proposer de nouvelles règles ou dispositions adaptées au mouvement des différentes situations, serait-ce souhaitable, confortable? 

Alors que la version complète de la présentation est accessible uniquement aux membres, voici la bande-annonce de ce panel:

Fourez, G. (2002). La construction des sciences. Introduction à la philosophie et à l’éthique des sciences. 4e édition. De Boeck.

NotebookLM : une plateforme d’IA générative pour l’enseignement et la recherche

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NotebookLM est une plateforme d’IA générative pour les enseignant·es, chercheur·es et étudiant·es qui veulent explorer, analyser ou synthétiser rapidement des documents qu'ils et elles soumettent sur cette plateforme. En combinant intelligence artificielle et interaction humaine, cette plateforme peut s'avérer fort utile. Suivre ce lien pour accéder au guide préparé par Clarence Pomerleau, étudiante au doctorat, suivre ce lien.


Le tutorat par les pairs, une voie alternative

Le tutorat par les pairs est un dispositif complémentaire pour soutenir les apprentissages des élèves, en place depuis le XIXe siècle. Des élèves ayant maîtrisé un contenu aident leurs pairs, bénéficiant ainsi tous deux du processus : le tutoré développe ses connaissances, et le tuteur consolide les siennes. Ce dispositif flexible et peu coûteux peut contribuer à réduire les inégalités et à améliorer la motivation, la littératie, la numératie et les compétences socioaffectives. Pour être efficace, le tutorat doit s’inscrire dans la durée, se faire en petits groupes ou en individuel, et inclure un suivi des tuteurs. Des ressources et outils sont disponibles via le réseau PÉRISCOPE pour soutenir les enseignants dans sa mise en œuvre. Suivre ce lien.


Entretiens Jacques Cartier: colloque IA générative et co-élaboration de connaissances en salle de classe (17-18 octobre)

 

L'intelligence artificielle générative (IAG) soulève de nouveaux enjeux en matière d'engagement des élèves en classe. Puisque la participation en classe est l'un des quatre niveaux d'intervention et de recherche du réseau PÉRISCOPE, ce colloque, planifié avec des chercheur·es du GIS2IF, un regroupement de recherche associé au réseau PÉRISCOPE, est appelé à se pencher sur ces enjeux ainsi qu'une approche pédagogique reconnue pour miser sur l'agentivité des élèves. Pour en savoir davantage, suivre ce lien.


Imaginons une école pour tous: une série documentaire pour mieux comprendre l’inclusion

 

La nouvelle série documentaire de Julien Cadieux, animée par la journaliste Sophie Désautels et Mathilde, sa fille autiste, explore des initiatives d'inclusion des jeunes à besoins particuliers dans le milieu éducatif, tout en mettant en lumière des personnes engagées et passionnées... Produite par les Productions du Milieu, la série Imaginons une école pour tous qui peut être visionnée sur le site web de TFO, sera diffusée sur AMI-télé à compter du 27 août. Sophie Désautels a réalisé aussi un balado en six épisodes sur le sujet. La série est aussi accessible pour les personnes non voyantes.


Version finale de l'ouvrage collectif

La version finale de l’ouvrage collectif est maintenant disponible sur le site de la BAnQ. Merci à celles et ceux qui y ont collaboré, qui l’ont lu, qui l’ont partagé et qui en ont discuté. Plusieurs nouveaux chapitres ont été publiés depuis notre dernier partage, alors n’hésitez pas à y jeter un coup d’oeil.

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