Panels en réseau - série 5 - panel 4: Devant l'INEÉvitable, comment joindrions-nous les deux bouts?


Le quatrième panel de la cinquième série des Panels en réseau, qui a eu lieu le 15 juin 2023, a fait suite au symposium PÉRISCOPE/CERÉussite qui portait sur le projet FRQSC dirigé par Denis Savard et qui s’intitule « Faciliter l'intégration des connaissances issues de la recherche dans les pratiques éducatives et pédagogiques du personnel enseignant: actions et impacts du CERÉ ». Il existe un comité d'engagement pour la réussite des élèves (CERÉ) dans chaque centre de services scolaire (CSS). Le panel a permis de discuter des enjeux que soulève le projet de loi 23 en éducation comprenant, entre autres, la création d’un institut national d’excellence en éducation (INEÉ). Pour l’occasion, le panel accueillait les participant·es suivant·es : Denis Savard (CRIRES, Université Laval), Catherine Larouche (CRIRES, UQAC) et Nancy Granger (CRIRES, Université de Sherbrooke). Thérèse Laferrière, chercheuse principale du réseau PÉRISCOPE, a guidé cette rencontre.

La question « Comment joindrions-nous les deux bouts? » se rapporte aux défis des universitaires et des praticien·nes de terrain que l’INEÉ soulèverait s’il était mis sur pied. Quant à l’INEÉ lui-même, les questionnements se rapportent à l’efficacité que pourrait avoir l’institut ainsi que la pertinence de voir certaines instances en éducation réformées (voire abandonnées) par la même occasion.

Pour M. Savard, il est important de rappeler le contexte actuel. De plus, il mentionne qu’il est souhaitable d’éviter les pensées binaires. Ainsi, il ajoute qu’il est inutile d’affirmer qu’il n’y a aucun canal de communication entre les milieux pratique et de recherche ou que le système éducatif va très mal. M. Savard rappelle plutôt qu’il existe déjà des canaux de communication entre les milieux pratique et théorique, mais qu’il serait intéressant de se pencher sur les possibilités d’amélioration. De la même manière, il précise que le système éducatif ne connait pas que des ratés, car le taux de diplomation a grandement augmenté depuis la dernière réforme. Il est donc nécessaire de pointer les réels enjeux ou problèmes sur lesquels se pencher et de ne pas grossièrement généraliser la situation. Dans ce même ordre d’idées, il partage les derniers efforts du CRIRES en ce sens. Le centre de recherche étudie présentement les plans d’engagement vers la réussite (PEVR) afin d’établir les besoins les plus urgents des acteurs de terrain.

De son côté, Mme Larouche renchérit sur la légitimité du projet de loi 23. Effectivement, si, en étudiant de plus près ce que propose le projet de loi, on constate que ce dernier n’est pas en mesure de répondre aux besoins actuels de la société, il ne peut être qualifié de légitime. À son avis, il est primordial de s’assurer de cette légitimité, d’autant plus qu’il s’agit d’une grosse réforme. De plus, Mme Larouche s’interroge sur la pertinence de centraliser autant de pouvoirs non encore définis ou mal définis. Elle complète en précisant que la réflexion qui sous-tend la présence de tous et toutes au panel est très complexe. Pour faire face à cette complexité, elle rappelle les trois éléments du livre Dialogue sur la connaissance d’Edgar Morin : 1) Faire dialoguer la science avec l’expérience; 2) Appliquer le principe de l’hologramme, soit de considérer que toutes les parties sont dans le tout, mais que le tout est aussi à l’intérieur des parties; et 3) Considérer la récursion organisationnelle, qui est une boucle génératrice dans laquelle les produits et les effets sont eux-mêmes producteurs et causateurs de ce qui les produit.

Pour ce qui est de Mme Granger, elle soumet d’emblée l’idée de « faire savoir le savoir-faire ». Selon elle (et selon d’autres invité·es du panel), il existe déjà du savoir-faire pertinent dans les milieux pratique et de recherche. Elle ajoute également qu’elle croit qu’il serait difficile de conserver le dialogue et l’effort de partenariat entre les organismes actuels en éducation avec la présence de l’INEÉ si l’institut peut faire ce qu’il désire de son côté. Mme Granger partage sa réflexion concernant la pertinence de refléter une diversité dans la recherche afin de mieux répondre aux besoins, eux aussi diversifiés, des milieux de pratique. Le système éducatif est trop complexe pour être « rangé entièrement dans une seule boîte ».

En réponse à ces différentes interventions, d’autres personnes invitées au panel ont soulevé des points aussi très intéressants. Plusieurs sont d’avis qu’une seule solution (en l’occurrence l’INEÉ) ne peut pas répondre au grand nombre de besoins en éducation. D’autres ont discuté de la complexité même du domaine de l’éducation. En effet, ce domaine se nourrit de plusieurs autres disciplines, telle que la didactique, la psychologie, la sociologie, l’orthopédagogie, etc. De ce fait, la présence de plusieurs instances en éducation soutient cette réalité complexe et en permet son étude sous différentes perspectives.

En somme, est-ce qu’un INEÉ est vraiment souhaitable? Et même si la réponse est négative, comment « joindre les deux bouts » s’il vient à être instauré? 

Voici la bande-annonce du panel: