Le 4 mars 2021 s’est déroulée la deuxième séance de la troisième série des Panels en réseau portant sur évaluer en classe ou télé-évaluer les apprentissages en lien avec la thématique générale qui est les inégalités et les iniquitésscolaires en temps de la Covid-19. Linda Saint-Pierre (CTREQ), Mélanie Tremblay (UQAR), Audrey Raynault et Judith Cantin (Polytechnique de Montréal) ont traité de l’évaluation et de la télé-évaluation et soulevé des manières de composer avec les deux.
Dans une réflexion générale, Mme St-Pierre indique que les critiques et propos au sujet de l’évaluation à l’école sont semblables depuis des décennies. Malgré les quelques ajustements qui y ont été apportés, un défi de cohérence persiste. C’est pourtant un acte incontournable qui relève à la fois de la pédagogie et de l’administration. De même, il y a souvent une confusion entre mesure et jugement ainsi qu’un délaissement de l’évaluation du processus évaluatif comme tel. C’est sans doute un des facteurs qui contribuent à la culture de la note, laquelle – comme l’indique le rapport du CSÉ (2018) – diminue l’acte d’évaluer, dévalue l’acte d’apprendre au profit de la performance et joue sur les iniquités scolaires. Évaluer est donc un acte complexe qui engage à se responsabiliser – et la Covid-19 en ajoute. Oser faire autrement ensemble contribuerait à dépasser des obstacles concrets, à composer avec la diversité des possibles, à juger de la pertinence de certaines mesures, à mieux communiquer l’évaluation, à responsabiliser l’élève, à se rappeler l’importance de cultiver la curiosité d’apprendre et surtout à améliorer les conditions d’apprentissage de façon à favoriser la cohérence et l’équité dans les parcours scolaires. Cela repose sur une responsabilité partagée de se mettre en mouvement dans cette quête de cohérence systémique.
S’appuyant sur les propos de Mme St-Pierre, Mme Tremblay précise que les technologies ne sont pas de simples outils d’aide à l’apprentissage, parce qu’elles influencent l’activité d’apprentissage et, donc, son évaluation. Le projet ÉCRAN (FRQSC 2020-2023) en tient compte. L’objet de l’évaluation est un processus et non quelque chose de fixe, ce qui ouvre la porte à toute une activité réflexive à la fois chez l’élève et l’enseignant·e. De fait, conformément aux recherches en didactique, on ne peut réviser l’évaluation des apprentissages sans s’interroger, voire revoir, ce qu’est apprendre à l’école (p.ex. en envisageant autrement le développement de la compétence X tout en prenant compte des avantages et limites des critères des grilles usuelles). De plus, nous avons actuellement des ressources technologiques qui permettent de mieux documenter le processus d’apprentissage et, donc, son évaluation. Ces ressources ne sont toutefois pas répandues dans toutes les classes au Québec et leur degré d’appropriation varie, ce qui accroit les iniquités. Par conséquent, la révision de l’évaluation doit inclure une reconsidération des ressources technologiques, parce que leur présence est susceptible de transformer l’activité d’apprentissage et son évaluation. Il y a d’ailleurs, depuis la pandémie, un mouvement de fond qui s’intensifie en cherchant à intégrer l’apprentissage dans une démarche réflexive, à réviser l’évaluation et à reconnaitre l’apport des technologies numériques.
Au postsecondaire, de nouvelles pratiques sont aussi explorées. Mme Raynault et Mme Cantin présentent deux façons de télé-évaluer : l’examen collaboratif et l’examen oral. L’examen collaboratif à distance contribue à une compréhension plus en profondeur ainsi qu’au développement des compétences individuelles et interpersonnelles. L’évaluation rapportée se réalise en trois phases : (1) l’étape préparatoire où l’on planifie et communique le déroulement et ses attentes, (2) l’étape individuelle qui s’apparente à un examen conventionnel, puis (3) l’étape collaborative qui se déroule le même jour que la 2e phase et qui reprend certaines de ces questions tout en posant des problèmes plus complexes que les étudiant·e·s doivent alors résoudre en équipe. L’examen oral à distance renvoie à une activité évaluative synchrone durant laquelle l’étudiant·e démontre ses capacités en présentant ou en répondant à une série de questions. Le succès de ce type d’évaluation s’appuie entre autres sur la communication des objectifs d’apprentissage, des critères d’évaluation et des scénarios possibles durant l’examen. C’est dire que ces deux types d’examens soulèvent des bénéfices de la télé-évaluation. Plus précisément, ils réduiraient l’anxiété des étudiant·e·s, augmenteraient leur rendement, amélioreraient leur perception du cours et leur motivation à étudier.
Certes, l’organisation scolaire et la mobilisation des acteur·e·s restent un défi majeur de l’innovation en matière de conception de modes d’évaluation des apprentissages, de mise sur pied et de popularisation. Questionner leurs présupposés sur l’activité d’apprentissage elle-même est peut-être une clé. En voici une courte liste qui s’appuie sur les propos soulevés durant les derniers échanges :
Conseil supérieur de l’éducation (2018). Évaluer pour que ça compte vraiment, Rapport sur l’état et les besoins de l’éducation 2016-2018. Gouvernement du Québec. https://www.cse.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/2019/09/50-0508.pdf
Alors que la version complète de la présentation est accessible uniquement aux membres, voici la bande-annonce de ce panel: